Est-ce qu’il y a trop de touristes à Québec? Je ne le crois pas. Pourtant, en octobre dernier, la remarque d’un hôtelier a soulevé la question de la qualité de l’accueil offert aux visiteurs lorsque plusieurs navires de croisières accostent en même temps au Port de Québec.
Bien sûr, le débarquement de 10 000 croisiéristes, le samedi de la fin de semaine de l’Action de grâce au moment où un grand nombre d’autres visiteurs viennent profiter du spectacle des couleurs d’automne, explique qu’il y ait momentanément une certaine congestion dans les rues du Vieux-Québec. Mais peut-on appeler cela du surtourisme?
Le surtourisme est un phénomène qui fait couler beaucoup d’encre depuis quelques années. Le cas des villes de Barcelone, de Venise et de Dubrovnik est souvent mentionné. On entend parler des réactions des résidents qui se disent constamment envahis par un nombre de visiteurs qu’ils jugent disproportionné; ils dénoncent la hausse artificielle du coût des logements, la congestion routière et les impacts négatifs sur l’environnement que cet achalandage provoque. Peut-on dire que Québec vit la même situation? Je ne crois pas.
Il faut tout d’abord faire attention lorsque l’on attribue aux touristes la seule responsabilité de la congestion du Vieux-Québec. Ainsi, en octobre le taux d’occupation au cours des dernières années a tourné autour de 79 % dans les hôtels de 200 chambres et plus, qui sont majoritairement situés dans le Vieux-Québec. Cette donnée implique qu’en moyenne une chambre sur cinq demeure vide chaque jour d’octobre dans ces grands hôtels et encore plus dans l’ensemble du Vieux-Québec puisque les plus petits hôtels et auberges ont généralement des taux d’occupation plus faibles.
Bien sûr, ce taux augmente les fins de semaine, mais il y a aussi d’autres personnes qui visitent le Vieux-Québec. Les excursionnistes, c’est-à-dire les visiteurs qui viennent des régions environnantes, y font souvent une visite de quelques heures, de même que la population locale qui vient s’y promener, aller au restaurant ou profiter du spectacle offert par ces beaux navires de croisières. Les croisiéristes se mêlent donc à d’autres visiteurs, ce qui peut créer de façon ponctuelle un fort achalandage.
L’Hôtel Château Laurier Québec étant situé directement sur la rue Grande Allée, je constate des pointes d’achalandage lors de grands événements qui se tiennent sur les Plaines d’Abraham, comme on peut aussi en voir dans les commerces et restaurants lors des belles journées d’été ou lors d’événements spéciaux. Et personne ne parle alors de surtourisme ou de surpopulation. Bien sûr, il peut être moins agréable pour certains de marcher sur la rue lors de ces jours de fort achalandage, mais si on y est, on peut difficilement se plaindre que d’autres y soient aussi. Non?
Je crois aussi qu’il est faux de parler de tourisme de masse à Québec, comme je l’ai vu dans un titre de journal. On associe généralement le tourisme de masse aux destinations qui profitent d’un bassin de population énorme à relative proximité, d’un accès aérien facile et d’un hébergement peu coûteux. Québec est une destination encore économiquement accessible, mais elle ne se compare en rien aux destinations soleil ou à certaines villes américaines ou européennes. À titre de comparaison, au cours des 10 dernières années, le Canada a connu une augmentation d’environ 9 % de son achalandage touristique comparativement à 28 % en Europe, 48 % aux États-Unis, 64 % au Mexique, 125 % en Thaïlande et 325 % en Islande! Le Canada, le Québec et la ville de Québec sont loin d’être des destinations visées par des hordes de touristes.
Enfin, pour ce qui est des croisiéristes, un travail immense a été fait afin que plus de navires de croisières viennent en embarquement et débarquement à Québec plutôt qu’en simple escale. L’objectif était d’augmenter les bénéfices pour les entreprises, les commerces et les travailleurs, tout en réduisant les impacts négatifs. Un croisiériste qui débute ou termine sa croisière à Québec a un comportement qui s’assimile plus à un touriste en séjour qu’à un excursionniste. Le fait de résider à l’hôtel quelques jours avant ou après la croisière implique moins de déplacements aller-retour au navire, plus de déplacements à pied ou en transports collectifs, car ce croisiériste a alors plus de temps pour réaliser ses visites. Les croisiéristes sont majoritairement des touristes qui proviennent de l’extérieur du Canada, qui génèrent donc de l’argent frais pour le Canada, pour le Québec et pour la région de Québec.
Est-ce que tout cela veut dire que rien ne peut être fait pour améliorer la situation? Non.
La culture, l’histoire et la géographie uniques de la ville font que le Vieux-Québec sera toujours un endroit attrayant pour les Québécois et pour ceux qui nous visitent. Mais, ses fortifications et son emplacement sur un promontoire en feront toujours un territoire qui pose des problèmes logistiques de circulation. Pour développer le tourisme de façon durable, les solutions d’avenir résident probablement à la fois:
- Dans l’étirement de la saison touristique pour mieux répartir les clientèles sur les 12 mois de l’année.
- Dans l’étalement des activités et événements sur l’ensemble du territoire (rive nord, rive sud) afin de mieux répartir les visiteurs dans l’espace.
- Dans le développement de stratégies encourageant une plus longue durée de séjour des touristes, car plus nos visiteurs demeurent longtemps, plus leurs comportements s’assimilent à ceux d’un résidant.
- Enfin, nous aurons sûrement à nous pencher sérieusement sur des modes de transport mieux adaptés aux déplacements entre la basse-ville et la haute ville (petits véhicules électriques à haute fréquence, rampe mobile en souterrain ou autre).
Ces quelques idées ne sont là que pour susciter une la discussion et une réelle réflexion sur l’avenir de Québec comme destination touristique et ville du patrimoine mondial, afin de continuer à offrir une belle expérience touristique et une belle qualité de vie à tous.
En cette période des fêtes, je profite de cette occasion pour vous offrir mes sincères vœux de santé, de paix et de bonheur à vous ainsi qu’à vos proches. Au plaisir de vous voir en 2019!
Mon coup de cœur musical : L’album Après de Fred Pellerin. Il aura fallu quatre années de patience avant de voir apparaître le quatrième album solo de ce conteur et chanteur. Encore une fois, il livre la marchandise avec une création musicale remplie d’émotions, de créativité et d’originalité.
Coup de coeur musical:
Après
Fred Pellerin